Au cœur des vallées montagneuses, un sport se distingue parmi les autres. Ballet vertical rythmé par les prises, l’escalade conquiert le monde de l’alpinisme. Portés par la soif de l’aventure, les grimpeurs ne peuvent résister à l’appel des sommets. Mais, connaissez-vous les différents types d’escalade ? Savez-vous que cette discipline regorge de complexité ? Du mur artificiel aux parois naturelles non équipées, chaque pratique est un défi à relever. Je vous invite à découvrir les principaux types d’escalade, tous aussi passionnants qu’intrigants.
L’escalade en voie : ballet vertical
La voie. Pratique sportive où l’homme et la paroi fusionnent en parfaite harmonie. L’assureur, le fidèle compagnon du grimpeur, se mue en coach attentif. Sa voix résonne pour insuffler courage et détermination à son partenaire évoluant sur les prises. La corde, tel un lien unissant les deux athlètes, tisse une toile de confiance et de cohésion inégalée. Sur les murs artificiels, l’alpiniste s’entraîne en vue d’explorer les plus beaux coins montagneux dès que les conditions le permettront. Une fois en pleine nature, il se fond avec la majesté des sommets. Son âme s’élève au fur et à mesure que son corps gravit la roche.
La voie en mur artificiel : terrain d’entraînement pour l’alpiniste
Dans la salle d’escalade, l’alpiniste affine sa technique. Véritable passionné du monde d’en haut, il prépare son corps et son esprit à l’ascension des titans de roche. Depuis les années 2000, l’essor de l’escalade en salle s’est accéléré. En Suisse romande, terre où je réside, le nombre de murs artificiels fleurit sans cesse. Trente salles se sont construites en seulement deux décennies ! Ce phénomène m’enchante ! N’est-ce pas là un moyen pour initier les hommes à la majesté et à la grandeur des sommets ?
Sur les parois artificielles, chaque voie se métamorphose en une œuvre. L’ouvreur, tel un artiste face à sa toile vierge, déploie son infinie créativité. Et le grimpeur, quant à lui, endosse le rôle du détective en déchiffrant les énigmes tissées par l’ouvreur. Il danse alors, avec grâce et légèreté, épousant chaque mouvement de la voie. Jusqu’à ce qu’il atteigne la dernière prise, témoin de sa victoire sur l’énigme concoctée par son créateur.
Comment ne pas évoquer Janja Garnbet lorsqu’il est question d’escalade en salle ? Originaire de Slovénie, cette étoile de la grimpe illumine la scène internationale. Elle gravit les marches du podium avec une régularité déconcertante, au point que les voies réservées aux femmes lors des compétitions ont dû être reconsidérées en raison de son niveau d’exception. Muse de la verticalité, Janja Garnbret nous enseigne que passion, persévérance et humilité sont les clés vers l’excellence.
La voie en mur naturel : de la couenne à la grande voie
Le soleil émerge. Il embrase les sommets et assèche les parois naturelles. L’escalade en plein air ouvre ses bras au grimpeur. Celui-ci se hâte de s’aventurer au cœur des pyramides de roche. Il consulte alors son guide sacré, le « topo », qui cartographie les voies et les défis qui s’offrent à lui. Baudrier, chaussons, corde, dégaines, casque… il prépare soigneusement son équipement d’extérieur en vue de défier les falaises naturelles.
Le passionné des cimes peut choisir un secteur de couenne. Ces falaises ne font qu’une longueur de corde et le grimpeur, qu’il choisisse la tête ou la moulinette, est assuré au pied de la voie. Nécessitant moins de temps de préparation, la couenne offre une expérience semblable aux murs artificiels. Sur ces parois naturelles de dix à quarante mètres de hauteur, l’athlète progresse au rythme de la roche. Il installe ses propres dégaines sur des spits ou des pitons fixés par l’ouvreur.
En grande voie, le grimpeur ne fait plus qu’un avec la montagne. Évoluant à travers un enchaînement de plusieurs longueurs, il s’aventure dans un terrain vertical allant de 50 à parfois 900 mètres de hauteur. Parmi les plus renommées, la vertigineuse paroi d’El Capitan, aux États-Unis. Surnommée le « Big Wall », cette falaise n’attend qu’à être conquise par les meilleurs de la planète.
Le bloc : affinement de la technique en grimpe
Alors qu’en voie, le grimpeur perfectionne principalement sa résistance et son endurance, en bloc, il travaille sa technique à travers un enchaînement de quelques mouvements précis. Les murs de bloc ont une hauteur moyenne de 4,5 mètres.
Le bloc en salle : essor d’une pratique urbaine
Au cours des dernières décennies, les salles de bloc gagnent en popularité en Europe et attirent un nombre croissant de nouveaux pratiquants. Lieu de convivialité et de rencontres, les sportifs s’encouragent, se soutiennent et unissent leur force pour percer le mystère des lignes créées par l’ouvreur. Si cette discipline ne requiert pas l’endurance de l’escalade en voie, elle exige néanmoins une grande concentration, une force brute sur seulement quelques mètres. Les difficultés se classent souvent selon un système de codage couleur :
- Blanc : très facile (3a/3c)
- Orange : facile (4a/4c)
- Vert : moyen (5a/5c)
- Bleu : difficile (6a/6b)
- Rouge : très difficile (6c/7a)
- Noir : extrême (7a/7b)
- Violet : abominable (7b+ et au-delà)
Parmi les noms illustres, Daniel Woods se distingue. Il impressionne par sa technique infaillible et son dévouement total à l’art de l’escalade. Ouvreur prodigieux, Daniel Woods repousse les limites de ce qui est concevable. Une de ses passions réside dans la création de blocs d’une difficulté extrême, que seuls de très rares athlètes osent défier.
Les blocs en plein air : joyau de la nature
Dans les vastes étendues sauvages, d’imposants rochers surgissent des profondeurs de la terre. Ils appellent les sportifs à escalader leurs flancs escarpés. Accompagné de son précieux topo, le grimpeur scrute avec attention la ligne qui l’inspire. Lorsqu’il atteint enfin la dernière prise, il se laisse glisser sur son crash pad, le cœur rempli d’excitation à l’idée d’avoir vaincu le rocher. Son regard se tourne déjà vers le prochain bloc à conquérir. Un trésor caché qui n’attend qu’à être découvert.
Certains sites de bloc en plein air se dressent en véritables légendes vivantes. Parmi eux, la forêt de Fontainebleau, située non loin de Paris. Une référence pour les grimpeurs du monde entier. Ces terres offrent un éventail de sites, où chaque rocher représente un défi à relever. Aujourd’hui, la forêt abrite plus de 30 000 blocs, répartis en 270 secteurs et 280 circuits adaptés à tous les niveaux. Fontainebleau demeure une destination de premier choix où les grands noms de l’escalade laissent leur empreinte, inscrivant ainsi cette région dans les annales de l’histoire de ce sport passionnant.
L’escalade en solo : naissance d’un sport extrême
L’escalade libre, le solo, le free solo… Sans aucun doute parmi les pratiques les plus téméraires de ce sport. Le grimpeur, bravant l’abîme, choisit de s’élever sur des falaises toujours plus vertigineuses. Dans une concentration extrême, il évolue, en solitaire, conscient que la moindre erreur peut lui être fatale.
Il existe deux pratiques d’escalade en solitaire, chacune véhiculant son lot d’audace et d’émotions intenses. D’abord, le solo avec auto-assurage, où le grimpeur progresse sur la voie en s’assurant lui-même. Un équilibre délicat entre ascension et sécurisation. Cette méthode requiert des compétences techniques avancées, utilisant divers équipements spécialisés tels que des dispositifs mécaniques de blocage ou anti-chute, des absorbeurs de chocs, des cordes statiques…
Puis, vient l’escalade en solo intégral. La forme la plus périlleuse de l’escalade libre. Le féru de la roche, solitaire dans son ascension, refuse toute protection. Il affronte la verticalité avec héroïsme. Chaque instant devient une danse entre la vie et la tragédie. Mais alors, qu’est-ce qui pousse ces grimpeurs de l’extrême à s’engager dans cette forme d’escalade ? Un désir de transcender les limites ? Un appel à la liberté absolue ? Une quête d’émotions intenses ? Je ne saurais répondre à cette question.
Et dans ce monde aussi intrigant que périlleux, Alex Honnold est une légende. Dès son plus jeune âge, le félin des cimes baigne dans l’univers de la verticalité. Au fil des années, sa technique s’affine et sa force mentale devient son noble compagnon.
Alex Honnold demeure particulièrement célèbre pour son exploit retentissant à l’El Capitan, dans le parc national de Yosemite, en Californie. Le 3 juin 2017, il marque l’histoire de l’escalade en gravissant la voie « Freerider » qui s’étend sur près de 900 mètres, sans aucune protection pour le retenir en cas de chute. Il affronte ainsi une des parois les plus redoutables et exposées au monde. Si l’histoire vous intrigue, je vous invite à visionner le film « Free Solo », réalisé par Elizabeth Chai Vasarhelyi et Jimmy Chin. Une exploration captivante de cette prouesse hors norme.
L’escalade artificielle : échappée verticale
Connue sous le nom de « Artif » dans le jargon des passionnés, elle est une méthode d’ascension des parois qui met à l’épreuve bien des alpinistes. À l’aide de pitons, de spits, ou de crochets goutte d’eau, l’alpiniste façonne sa propre ligne dans la roche. Les points de progression qu’il crée, indispensables à sa sécurité, servent également d’ancrages pour l’assurage du grimpeur.
À l’opposé de l’escalade libre, qui privilégie la pureté de l’ascension sans artifice, cette méthode repose sur l’utilisation des aides externes. L’athlète progresse en se suspendant à un crochet fifi ou en montant à l’aide d’étriers, tandis que la corde assure et bloque alternativement le mouvement du grimpeur sur les deux brins.
Contrairement à l’escalade libre, où la force physique et l’agilité athlétique sont mises à l’épreuve, l’artif valorise davantage les compétences techniques et mentales. Mais il serait imprudent de sous-estimer les exigences physiques de cette discipline, qui requiert une coordination précise et une endurance psychologique à toute épreuve.
En escalade artificielle, chaque mouvement devient une invitation à observer, à ressentir, à s’émerveiller devant la beauté brute de la montagne. Et sur les terrains glacés, où les pitons sont remplacés par des broches à glace, cette discipline prend une allure polaire. Et l’alpiniste, aussi petit qu’il puisse paraître face à l’immensité glaciale, goûte à l’ultime liberté.
Escalade en Terrain d’Aventure : à la conquête des sommets
Quand l’âme aventurière se fond à la majesté des cimes, le terrain d’aventure (TA), appelle l’alpiniste depuis le fond de sa vallée. Mais, en quoi consiste cette discipline ? Elle est la forme la plus brute et sauvage de la pratique de ce sport, on parle aussi de« trad » dans le jargon consacré. La paroi, dénuée de spits et de pitons, l’homme la gravit à l’aide de son équipement personnel. Coinceurs, friends, sangles… il devient le capitaine des hauteurs. Comme un navigateur au milieu du Pacifique, comme une équipe de marins flottant sur les eaux profondes, la cordée brave les géants de glace et de roche. Et dans cet océan de pyramides naturelles, le grimpeur écoute le son de la haute montagne. Il observe, analyse les vents et les nuages changeants. Il guette l’heure qui défile. Car si l’horaire prévu est dépassé, il sera condamné à bivouaquer sous d’atroces conditions. Et son destin peut lui être tragique.
Si l’envie vous vient de découvrir le système de cotations en TA, le topo CamptoCamp le décrit avec précision. Dans cette pratique de l’escalade, les niveaux d’équipement varient de P1 à P4+ et témoignent de la diversité des voies et de leurs exigences. Des itinéraires totalement équipés aux parcours entièrement vierges, chaque course en terrain d’aventure façonne un voyage unique, imprévisible et envoûtant.
La traversée des Grandes Jorasses illustre l’essence de l’escalade en terrain d’aventure. Majestueuse arête, perchée au-delà des 4000 mètres d’altitude, elle est une des plus belles courses classiques des Alpes. Gravir sept montagnes de plus de 4000 mètres, contempler des panoramas aussi magnifiques que féroces, s’immerger dans un monde glacial, où la grandeur des cimes se mêle à la petitesse de l’homme.
Du refuge Torino à la Pointe Walker, chaque sommet vaincu compose un hymne de joie dans le cœur de l’alpiniste. Une parenthèse à travers un voyage céleste, nul n’est insensible à la leçon d’humilité que transmet la traversée des Grandes Jorasses face à la puissance des éléments présents en montagne.
D’une simple pratique en salle au terrain d’aventure, l’escalade conquiert progressivement les hommes. Mais, par-delà la grimpe sur mur artificiel, j’apprécie particulièrement ce sport lorsqu’il me permet de fusionner avec la montagne. Toucher le rocher, respirer l’air pur d’un univers entre ciel et terre, goûter à la simplicité d’un monde céleste. Voilà ce à quoi j’aspire profondément.