Les vents font rage au sommet du mont Blanc, roi des Alpes françaises. J’ai réalisé cette photographie foudroyante depuis l’Italie. C’est de là que la montagne dévoile sa silhouette la plus spectaculaire et sa personnalité la plus sauvage. Face à nous, se dessinent, entre noir et blanc, les voies les plus difficiles à arpenter pour atteindre la cime du mont Blanc de Courmayeur. Sur la gauche serpente l’intégrale du Brouillard, traversant plusieurs sommets de plus de 4000 mètres d’altitude : la pointe Baretti, le mont Brouillard et la pointe Louis Amédée. Sur la droite, la traversée intégrale de Peuterey relie l’Aiguille Noire de Peuterey, les Dames Anglaises et l’Aiguille Blanche de Peuterey.

Dans la brume transparaît le pilier central du Frêney, sous la crête du mont Blanc de Courmayeur. Sombre témoin du drame qui s’est joué sur ses flancs durant l’été 1961. Quatre alpinistes chevronnés ont alors succombé aux assauts d’un terrifiant orage. Destin tragique de l’homme qui, malgré tous ses efforts, reste soumis à la volonté ultime de la nature. Walter Bonatti survécut à ce drame, magnifiquement raconté par Virginie Troussier dans son livre Au milieu de l’été, un invincible hiver.

J’ai réalisé ce portrait du mont Blanc au printemps, alors qu’une tempête venant de l’Italie se déversait sur les Alpes du nord. Sur la photographie, la haute montagne lutte encore contre les vents déchaînés qui soufflent les sommets. Mais elle ne cédera rien à la fureur des éléments, souveraine et immuable. Il m’a fallu plusieurs années avant de parvenir à immortaliser ainsi le massif du Mont-Blanc. Ce jour-là, la nature m’a offert à voir son absolue beauté. Quelle chance incroyable j’ai eue ! Toutes les conditions qui font de mon art une ode à la montagne étaient réunies. La neige s’accroche aux parois rocheuses, les nuages parcourent la vallée et la brume coiffe les sommets. En réalisant cet impressionnant panorama du plus célèbre massif des Alpes, j’ai voulu transmettre l’infinie puissance de la montagne. Beaucoup d’émotions se dégagent du tableau. Lorsque j’y plonge le regard, je suis transporté dans un autre monde, sublime et authentique. Ses reliefs m’émerveillent et ses arêtes, accessibles seulement aux alpinistes les plus expérimentés, me font immanquablement rêver.